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La petite maison dans la banlieue

Le jour où Auguste Comte m'a sauvé la vie

18 Juin 2018, 22:03pm

Publié par lapetitemaison

© Jean-Pierre Dalbéra/Wikipedia

© Jean-Pierre Dalbéra/Wikipedia

Premier jour du bac, session de juin 1998. Des semaines que je révisais, à l'aide de fiches soigneusement rédigées sur des bristols au cours de samedis et de dimanches entiers passés au CDI de mon lycée où je me dispersais moins que chez mes grands-parents en ces jours de Coupe du monde. Que mon grand-père regardait assidûment, et j'ai regardé quelques matches avec lui — un France/Afrique du Sud, notamment —sous prétexte de faire des "pauses".

J'avais toute une cassette homemade de chansons fétiches pour conjurer le sort et partir du bon pied ce matin-là. Malgré tous mes efforts, mes professeurs ne m'avaient en effet pas donné leur blanc-seing, et je n'avais pas eu l'avis favorable dans mon livret scolaire en cas de repêche à l'oral, mais un truc mal bricolé à base de "hum oui, mais pas sûr" ou quelque chose d'approchant. Autant dire qu'il y avait une certaine pression. Il était hors de question de se planter et de devoir refaire une Terminale. 

J'étais en train de me préparer dans la salle de bains, ma chanson fétiche allait arriver, celle qui me donnerait la pêche, ordonnerait mon raisonnement et ferait de ma copie un chef-d'œuvre et non pas un de ces trucs mal emmanchés qui m'avait valu de plafonner à 9 en philo toute l'année. A coefficient 7, il y avait un enjeu sur cette épreuve.

C'était mon grand-père qui toquait : "Dépêche-toi, on va être en retard." J'étais convoquée au lycée de Suresnes, à 15 minutes de là en voiture. Je renonçai à la chanson fétiche, rassemblait mes affaires - convocation, carte d'identité, trousse, en cas, etc - et nous voilà partis. Un lundi de juin à 7 h 20, autant dire que les rues étaient désertes, et mon grand-père stressé. Il avait la conduite sport (huhu), et je ne suis pas sûre que nous ayons vraiment respecté le 50 à l'heure ce matin-là. 

Bref, on est arrivés très, très en avance. Bien 25 minutes avant le début des épreuves. J'étais la première devant le lycée. Pour être à l'heure, j'étais à l'heure. Je n'ai aucun souvenir des sujets de dissertation, qui ne m'inspiraient absolument pas. En revanche le commentaire, un texte d'Auguste Comte sur le positivisme, j'allais réussir à en faire quelque chose. Tout s'enchaînait clairement, et les mots pour le dire venaient aisément (feat. Nicolas Boileau). 

Le 6 juillet suivant, les résultats tombaient. Non seulement j'avais explosé tous les scores en philo, mais j'avais même décroché une mention. Faisant mentir tous les pronostics de mes profs de Terminale qui avaient dû sans doute parier sur mon cas pour être-celle-qui-ne-l'-aurait pas. Depuis, quand je passe place de la Sorbonne, j'ai une pensée très reconnaissante pour Auguste. Le bac, c'est beaucoup grâce à lui. 

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